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Pas de miracle dans le développement économique de l’Asie, de l’industrie !

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Secteur Privé & Développement

Secteur Privé & Développement #34 - Le secteur industriel à l'heure du développement durable : quels enjeux ?

Indispensable au développement économique, le secteur industriel fait aussi l’objet de controverses (impact environnemental, création d’emplois décents, etc.) Le 34ème numéro de Secteur Privé & Développement est dédié aux enjeux que pose ce secteur à l’heure du développement durable.

Lorsque l’on étudie les dynamiques de développement industriel et leurs impacts sur l’économie, à l’échelle globale, le modèle asiatique peut incontestablement être cité en exemple. Plus que les politiques d’ouverture, ce sont les efforts portés sur l’investissement dans l’industrie qui ont permis des changements structurels rapides au sein des économies asiatiques. À travers le prisme asiatique, Marc Lautier et Jean-Raphaël Chaponnière analysent l’impact de l’industrie sur le développement des économies.

Depuis le rattrapage du Japon et le décollage des « nouveaux pays industriels » (NPI), puis l’émergence de l’Asie du Sud- Est et de la Chine, le développement de l’Asie bouleverse les structures de l’économie mondiale. Il constitue le principal changement intervenu dans le monde en développement au cours des cinquante dernières années. Cette lame de fond, qui a sorti près de la moitié de la population mondiale de la pauvreté, est souvent présentée comme une succession d’épisodes conjoncturels, voire « miraculeux ». L’Asie n’est cependant pas une addition d’exceptions mais une référence pour l’économie du développement, et les dynamiques d’industrialisation sont au premier plan de ces processus. À la période des indépendances, l’Asie semblait pourtant mal partie pour le développement et l’« Asie pessimisme » dominait. En 1960, la Corée du Sud était plus pauvre que le Ghana, à Séoul les conseillers américains désespéraient de son avenir et, en 1964, un journaliste économique concluait ainsi son analyse : « La Corée est une nation très pauvre et une série de miracles, de même qu’un bon jugement et beaucoup de travail seront nécessaires pour doter ce pays d’une économie viable »1 ; le revenu par habitant à Taïwan était inférieur à celui du Brésil et quatre fois plus faible qu’en Argentine ; Hong Kong et Singapour étaient à peine plus riches. Au cours de cette décennie, ces quatre économies entrent progressivement dans une dynamique de croissance sans précédent : en moins d’une génération (1960-1980), le revenu par habitant est multiplié par quatre. Plus spectaculaire encore que celle du Japon, la croissance s’accélère au cours des années 1980, considérées en Amérique latine et en Afrique comme une (première) décennie perdue. À l’aube des années 1990, Taïwan et la Corée du Sud ont réalisé le développement économique le plus rapide de l’histoire ! La diffusion de la croissance se poursuit en Asie dans les pays qui ne pratiquent pas l’isolement, marquée ainsi dans les années 1980 par l’émergence de l’Indonésie, de la Malaisie, de la Thaïlande, puis au cours des deux décennies suivantes par la croissance de la Chine et du Vietnam. Au cours des trois dernières décennies, la croissance a été près de trois fois plus rapide en Asie de l’Est qu’en Amérique latine ou en Afrique subsaharienne. Elle s’est accompagnée d’une amélioration des indicateurs de développement humain, qui se situent désormais aux premiers rangs du monde en développement.