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Democratic Republic of Congo
La Facilité d’investissement et de soutien aux entreprises en Afrique (FISEA) a été une des premières initiatives d’investissement en capital-risque mise en place par le groupe AFD en faveur de pays fragiles. Lancée en 2009, elle a été abondée de nouveau en 2021 dans le cadre de Choose Africa. L’initiative est aujourd’hui d’une taille totale de 490 millions d’euros, dont une partie est dédiée spécifiquement à des investissements en direction des pays fragiles.

Dotée à l’origine d’une capacité d’investissement de 250 millions d’euros, l’initiative FISEA s’est inscrite dans une vision ambitieuse de soutien au développement du tissu des petites et moyennes entreprises africaines. L’objectif initial était de contribuer à la création ou au maintien de 100 000 emplois sur le continent. Cette initiative, portée par l’Agence française de développement (AFD), promeut une approche généraliste, visant à soutenir les secteurs d’activité ayant un fort potentiel de croissance et de développement humain sur le continent africain. Sa capacité d’investissement est aujourd’hui de 490 millions d’euros et s’inscrit pleinement dans les ambitions de l’initiative Choose Africa.

 

UNE FACILITÉ ADAPTÉE AUX PAYS FRAGILES ET À FAIBLE REVENU

À l’instar de l’activité de fonds propres de Proparco, deux modes d’investissement ont été retenus pour FISEA : l’intermédiation, via les fonds d’investissement, et les investissements directs dans des entreprises du continent. Les interventions en faveur du secteur privé se doivent d’être rentables – il s’agit d’un critère essentiel, venant confirmer le succès et la pérennité des investissements financés. Toutefois, certains secteurs ou projets, tout en étant potentiellement rentables, présentent des profils de risque ou des décalages de rendement dans le temps qui les rendent difficilement finançables par le secteur privé, voire même par les institutions financières de développement comme Proparco. C’est particulièrement vrai dans des zones moins développées, en conflit ou post-conflit, avec un cadre politique ou macro-économique déstabilisé ou en voie de stabilisation – qui peuvent être regroupées sous le terme de « pays fragiles ».

Dès le début de l’initiative, l’activité de FISEA était positionnée sur des opérations plus risquées qu’à l’accoutumée, soit en raison de la taille des entreprises, en raison de la maturité du projet, de l’institution ou du pays considéré. Elle était donc destinée à être complémentaire des activités de l’AFD et de Proparco, en accompagnant des acteurs privés développant des projets novateurs et à fort impact – tout en ouvrant de nouveaux horizons d’investissement. Elle s’attachait ainsi à rechercher de nouveaux types de partenaires des opportunités d’investissement différentes du flux d’affaires traditionnel – parfois peu visibles et éloignées des processus de création de crédits, d’hypothèques ou d’instruments financiers – tout en proposant un accompagnement technique adapté. Cette offre duale d’investissement était un facteur de différentiation important pour le groupe AFD, et permettait d’aller plus loin dans le travail de développement et de soutien du secteur privé en Afrique.

 

ANALYSES DE LA PREMIÈRE PHASE D’INVESTISSEMENT

En 2019, 10 ans après la mise en œuvre de l’initiative, une étude conduite par le cabinet Steward Redqueen a évalué l’impact de FISEA au regard de ses ambitions initiales. Le rapport souligne les difficultés rencontrées pour parvenir à atteindre une exposition significative dans les pays fragiles. Malgré tout, 32 % des investissements de FISEA ont été dirigés vers des pays à faible revenu et 14 % vers les pays fragiles. Bien que ces niveaux soient plus élevés que les pourcentages relatifs des flux de capital-investissement capturés par ces pays, on aurait pu s’attendre à une contribution plus importante, étant donné l’importance accordée à cette thématique dans la stratégie de FISEA. Cela met en lumière le défi de trouver suffisamment d’opportunités d’investissement dans ces marchés, tout en maintenant un niveau de risque acceptable par rapport aux objectifs de retour financier fixés par l’AFD.

Par ailleurs, si 32 % du capital de FISEA a soutenu des entreprises de « pays à faible revenu », ces dernières ont représenté près de 50 % des structures investies par FISEA. Cela signifie que les entreprises de ces pays étaient en moyenne de taille plus modeste et que le soutien en faveur des petites et très petites entreprises a été plus marqué. En revanche, les 14 % de capital investis dans les « pays fragiles » ne représentent que 11 % des entreprises soutenues par FISEA. Ainsi le fonds African Rivers Fund (ARF), géré par XSML, a investi en dette, avec des tickets à partir de 100000 dollars. Doté de 50 millions de dollars, ce fonds soutient les TPE-PME, essentiellement en République démocratique du Congo. Il permet à des entrepreneurs – souvent issus de milieux défavorisés – d’accéder au capital. Afin d’évaluer l’additionnalité géographique de la facilité, le cabinet Steward Redqueen a comparé les investissements de FISEA avec les flux globaux de capital-investissement vers les pays africains, comme ceux suivis par l’Association africaine du capital-risque (AVCA). Pour près de 70 % des « pays fragiles ou à revenu faible » pour lesquels des données étaient disponibles, FISEA était plus exposée que le marché, en montant investi – et dans plusieurs cas, de manière significative (comme au Malawi et à Madagascar).

 

IMPORTANCE D’UNE DUE DILIGENCE DE QUALITÉ

L’analyse des retours financiers de ces investissements, au bout de dix ans, a montré que les meilleures performances financières latentes du portefeuille de FISEA se situaient au Sénégal, avec deux projets de taille importante qui « boostaient » sa performance, démontrant ainsi l’existence d’opportunités « bancables » dans les économies les moins avancées. À l’inverse, la Namibie, la Tanzanie, le Rwanda ou la Zambie enregistraient les moins bonnes performances. Mais il faut souligner que ces investissements ont été réalisés par les gestionnaires affichant les moins bonnes performances financières du portefeuille de FISEA. Les résultats financiers de ces investissements ont donc été davantage influencés par la qualité des équipes de gestion et des stratégies d’investissement que par les risques spécifiques des pays. Ce constat souligne l’importance de la qualité de la due diligence dans le processus d’investissement et de la gestion des risques dans des environnements complexes.

 

DE FISEA À FISEA+

Forts de ces enseignements, l’AFD et ses ministères de tutelle ont décidé d’orienter la stratégie de la nouvelle phase de l’initiative, baptisée FISEA+, en particulier vers un soutien explicite et accru (direct et indirect) en faveur des petites et moyennes entreprises opérant dans les pays fragiles. Elles représentent désormais l’une des quatre cibles prioritaires d’investissement de la facilité. En effet, Proparco constate avec ses partenaires (fonds d’investissement, entrepreneurs et banques locales) que les très petites et moyennes entreprises (TPME) ont difficilement accès aux financements locaux dans les zones les plus fragiles. Cela s’explique à la fois par la capacité des banques locales à prendre des risques, par le bilan des TPME, considéré comme peu solide (en termes de fonds propres) pour recevoir des financements de court terme seniors. Les conditions de financement des banques locales (maturités notamment) ne correspondent en outre pas toujours aux besoins des petites entreprises locales. Pour consolider leur bilan et avoir accès à des lignes de financement qui correspondent à leurs besoins, ces entreprises doivent ouvrir leur capital ou passer par des fonds de dette tels que ceux investis par FISEA (ARF, FEFISOL, BPI).

Depuis 2021, FISEA+ a ainsi investi dans des pays tels que la République démocratique du Congo, les territoires palestiniens, la Sierra Leone ou Madagascar. La facilité renouvelée peut intervenir, pour un montant limité, dans des fonds de capital growth qui investissent spécifiquement dans le tissu des TPE-PME locales ou des fonds de venture capital positionnés sur le pré-seed ou seed capital. FISEA+ peut également soutenir des initiatives en ayant un effet catalytique fort grâce à la mise en place de « tranches juniors » dans les fonds en complément de « tranches seniors », pour amener des gestionnaires établis à s’intéresser à de nouvelles stratégies et de nouvelles zones géographiques, tout en cherchant à mobiliser plus de capitaux pour les entreprises des pays les plus fragiles. L’accompagnement technique prévu dans le cadre de FISEA+ vise à apporter une expertise et un savoir-faire adaptés aux besoins des gestionnaires de fonds et des TPE-PME. La philosophie d’investissement de FISEA+, en accord avec l’initiative Choose Africa, est de continuer à soutenir le tissu de TPE/PME africaines et d’aller chercher des projets avec des impacts accrus et dont les critères d’éligibilité sont complémentaires des autres instruments du groupe AFD, et notamment du bilan de Proparco. Cette stratégie vise in fine à renforcer l’impact économique et social de l’initiative, tout en apportant du capital-risque pour investir dans les pays fragiles – là où il est le plus nécessaire et où il peut avoir l’effet multiplicateur le plus élevé.

Charline Jan

Charline Jan

Principal
Proparco

Parcours

Charline Jan a rejoint le groupe AFD en 2018 au sein du département Investissement (Private Equity). Elle instruit et gère des prises de participations dans des entreprises et des fonds d’investissement au sein de l’équipe Afrique et Moyen-Orient et est en charge du suivi de l’initiative FISEA à Proparco. Elle avait précédemment travaillé au sein de deux fonds d’investissement à impact (Oikocredit et Pamiga). Elle est diplômée d’Audencia et chargée de cours à HEC Paris.

Proparco

Filiale du groupe AFD dédiée au secteur privé, Proparco intervient depuis 45 ans pour promouvoir un développement durable en matière économique, sociale et environnementale.

Proparco participe au financement et à l’accompagnement d’entreprises et d’établissements financiers en Afrique, en Asie, en Amérique latine ou encore au Moyen-Orient. Son action se concentre sur les secteurs clés du développement : les infrastructures avec un focus sur les énergies renouvelables, l’agro-industrie, les institutions financières, la santé, l’éducation... Ses interventions visent à renforcer la contribution des acteurs privés à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD), adoptés par la communauté internationale en 2015.

Dans ce but, Proparco finance des sociétés dont l’activité participe à la création d’emplois et de revenus décents, à la fourniture de biens et de services essentiels, ainsi qu’à la lutte contre le changement climatique.

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