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Agriculture Afrique
Des chocs sans précédent – changement climatique, Covid-19, rupture des chaînes d’approvisionnement – ont récemment mis à mal la sécurité alimentaire dans le monde. Ainsi, entre 2021 et 2022, l’insécurité alimentaire dite aiguë a augmenté de 33 %. Les petites exploitations agricoles sont essentielles dans la résolution de cette crise, mais elles sont aussi les plus vulnérables aux chocs climatiques. Le renforcement de leur résilience climatique est donc devenu une priorité absolue pour les investisseurs du secteur, mais la démonstration de leur impact en la matière reste un défi.

Les 600 millions de petites exploitations agricoles que compte la planète fournissent un tiers de la production alimentaire mondiale. La hausse des températures, le manque d’eau et la fréquence accrue des phénomènes climatiques extrêmes fragilisent cependant la production de ces petits agriculteurs. En Afrique, les rendements de cultures de base comme le blé et le maïs devraient baisser de 10 à 20 % d’ici 2050. Les petits exploitants sont particulièrement vulnérables aux événements météorologiques inattendus, parce qu’ils dépendent principalement de l’agriculture pluviale, possèdent peu de foncier, et présentent de faibles niveaux d’éducation, avec des taux de pauvreté élevés. La mauvaise récolte d’une seule saison peut ainsi avoir un impact désastreux, durable, sur leur capacité à produire des denrées alimentaires et à nourrir leur famille.

 

RENFORCER LA PRODUCTIVITÉ, MAIS AUSSI LA RÉSILIENCE

Entreprises sociales, ONG, pouvoirs publics et instituts de recherche s’emploient depuis des décennies à développer et à déployer des solutions pour accroître la productivité des petites exploitations – en combinant formation, financement et accès au marché. 60 Decibels travaille avec ces financeurs pour mesurer leur impact, en particulier sur la production et les revenus. Cette mesure d’impact passe par l’écoute directe des petits agriculteurs concernés. Ces trois dernières années, 60 Decibels a ainsi recueilli la parole de 18 000 petits exploitants du Sud, à partir de questions standardisées visant à établir des critères comparatifs, ce qui a permis de mesurer la performance en matière d’impact.

Mais face à l’augmentation des risques climatiques, les financeurs ne sont plus uniquement soucieux d’accroître la production ; ils réfléchissent aussi aux moyens d’assurer la production alimentaire – et donc un revenu pérenne – dans le temps. Prenons l’exemple des sociétés qui financent les agriculteurs pour l’achat de semences de maïs de qualité. L’agriculteur contracte un emprunt, achète ses graines et plante un maïs qui lui offre un meilleur rendement. Sa production augmente, ses revenus aussi : il peut ainsi rembourser son crédit et nourrir sa famille. Il en résulte un bénéfice sociétal et une contribution positive à la sécurité alimentaire. Si les précipitations sont insuffisantes pour que le maïs puisse germer, l’agriculteur peut n’avoir aucune autre culture d’où tirer un revenu, et risque donc de ne pas pouvoir rembourser son prêt. Il peut alors être contraint de vendre son matériel de production, ou de retirer ses enfants de l’école – avec, à long terme, des conséquences néfastes sur sa capacité à produire de la nourriture ou à gagner sa vie.

Les financeurs du secteur envisagent désormais différents scénarios possibles, pour aider les agriculteurs à renforcer leur capacité de résistance aux aléas climatiques. Le prêteur pourra alors, par exemple, assortir son crédit d’un produit d’assurance-récolte, ou mettre son emprunteur en relation avec un service météorologique de conseil qui lui indiquera le meilleur moment pour planter.

 

POUR AGIR SUR LA RÉSILIENCE, IL FAUT LA MESURER

Pour renforcer la résilience des agriculteurs au changement climatique, – et, de ce fait, la sécurité alimentaire – il est essentiel de la mesurer. Mais comment mesurer les impacts sur tout un ensemble de scénarios – dont certains se seront produits, et d’autres non ? Il est très compliqué de prendre en compte l’intégralité des scénarios envisageables ; le financeur aurait besoin pour cela de tout savoir sur l’exploitation et la famille de son client, de connaître la probabilité de phénomènes météorologiques spécifiques, et de savoir quelles stratégies d’adaptation seront mises en œuvre par l’exploitant.

Mais il n’est pas nécessaire de se lancer dans une modélisation si complexe. Pour mesurer leur impact, les financeurs doivent surtout écouter les agriculteurs : ils savent, eux, ce qui les rend plus ou moins vulnérables aux chocs climatiques et comment réagir aux aléas.

Ainsi, en plus de mesurer l’impact sur les données directement observables par l’agriculteur – comme la production et le revenu –, 60 Decibels dispose aussi de critères simples et uniformisés pour recueillir la parole des exploitants et mesurer l’impact d’un financement sur la résilience climatique d’une exploitation. L’outil Climate Resilience Assessment, développé spécifiquement, mesure les variations des trois dimensions de la résilience d’une exploitation, au travers d’entretiens ciblés, réalisés à distance auprès d’un échantillon représentatif.

  1. La résilience perçue : quatre indicateurs clés sont utilisés pour estimer la façon dont une résilience individuelle a pu évoluer face à de possibles chocs futurs, du fait de l’action d’une entreprise donnée.
  2. La résilience constatée : pour les ménages ayant subi un choc récemment, cinq indicateurs supplémentaires permettent de mesurer comment ils s’en sont tirés, et quel a été l’impact de l’entreprise concernée sur leur rétablissement.
  3. Les ressources et éléments facilitateurs : on mesure l’évolution de l’accès de l’agriculteur aux ressources clés et aux facilitateurs dont on sait qu’ils sont des moteurs de résilience. Cela fournit des critères objectifs pour déterminer quels facteurs ont ainsi été modifiés, et l’on peut en tirer des informations exploitables sur les moyens de mieux soutenir les exploitants.

Grâce à cet outil, 60 Decibels développe des critères permettant de comparer la performance en matière d’impact de résilience, sur tout un ensemble de facteurs. Les indicateurs de résilience « perçue » et « constatée » pourront ainsi être indifféremment utilisés pour mesurer (et donc comparer) les impacts des financements sur des éleveurs de volailles en Éthiopie, sur les planteurs de café en Indonésie ou sur des commerçants au Nicaragua. Ressources et facteurs de facilitation sont quant à eux conçus pour être utilisés dans des combinaisons au cas par cas, tout en restant standardisés. L’objectif de cet outil est de permettre aux financeurs de mieux mesurer la résilience et la sécurité alimentaire globales des exploitants – et donc d’agir avec un maximum d’impact.

Ellie Turner

Ellie Turner

Responsable adjointe pour l’Agriculture
60 Decibels

Parcours

Titulaire d’un master en Économie de l’agriculture, de l’alimentation et des ressources, Ellie Turner bénéficie de 15 ans d’expérience dans la mise en œuvre et l’évaluation de programmes auprès de petits exploitants agricoles du Sud. Chez 60 Decibels, où elle est responsable adjointe pour l’Agriculture, elle travaille aux côtés d’investisseurs d’impact du secteur agricole, pour analyser et renforcer leur action auprès des exploitants. Précédemment, elle a participé à la mise en place du département Sécurité alimentaire et agriculture chez RTI International, un institut de recherche où elle supervisait des projets de développement agro- industriels en Afrique de l’Est.

60 Decibels

60 Decibels propose des services destinés à mesurer l’impact d’investissements, de façon simple, évolutive et efficace. Elle collecte des informations auprès de bénéficiaires partout dans le monde, et les transforme en données fiables et comparables pour aider ses clients à démontrer et à piloter leur performance sociétale. Leader dans son secteur, 60 Decibels a mis en place une infrastructure qui lui permet de réaliser à distance des mesures d’impact rapides et de qualité, notamment à travers son réseau de plus de 1 000 chercheurs, implantés dans plus de 75 pays, qui s’entretiennent directement avec les bénéficiaires finaux.

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