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L’épidémie de Covid-19 a frappé plus durement les pays les moins avancés, alors que ceux-ci sont déjà les plus affectés par le changement climatique. Pour leur garantir à l’avenir une meilleure résistance aux chocs, il semble nécessaire de mieux comprendre le rôle et l’impact du secteur privé sur les conditions de vie des populations les plus vulnérables. De nouveaux outils digitaux rendent cela possible.

En l’absence de systèmes de protection sociale minimale dans la majorité des pays en développement et de budgets gouvernementaux  permettant d’investir dans la résilience au changement climatique, les attentes à l’égard du secteur privé pour pallier ces manques sont élevées. Elles le sont encore plus en cas de crise sanitaire. Il faut en outre mieux comprendre le rôle des institutions financières et autres investisseurs du développement dans ce contexte et soutenir la « reconstruction en mieux », afin de garantir à l’avenir une meilleure résistance aux chocs. Pour analyser et comprendre les effets potentiels des entreprises sur la vie des gens en période de crise, il convient d’interroger directement les parties prenantes à ce sujet. De nouveaux outils numériques peuvent nous aider à éviter les difficultés causées par les restrictions de déplacement et autres limitations dans la collecte de données auprès des personnes concernées. En collaboration avec la société finlandaise Work Ahead, Finnfund a développé au cours des deux dernières années un outil d’enquête qui permet aux entreprises d’interroger leurs intervenants (employés, communautés, fournisseurs, etc.). Cette démarche vise à mieux comprendre les effets plus généraux que les entreprises ont sur la vie des personnes concernées. Traditionnellement, ces impacts globaux sont examinés par le biais d’études spécifiques et de méthodes de collecte de données qui nécessitent de longs entretiens individuels et en groupe. Ces études sont donc coûteuses et difficiles à répéter régulièrement. Même si elles sont essentielles pour une compréhension approfondie des mécanismes d’impact, elles ne sont pas très utiles pour un suivi régulier.

 

L’APPLICATION DIGITALE COUVRE TOUS LES IMPACTS DE LA CRISE

Au cours des deux phases pilotes, nous avons élaboré une série de questions types pour pouvoir construire progressivement des séries chronologiques et permettre ainsi aux entreprises d’évaluer leurs propres performances au fil des ans. Grâce aux données accumulées, elles sont par ailleurs en mesure de comparer leurs résultats avec ceux de leurs pairs, les données de l’indice de probabilité de pauvreté (PPI) facilitant les comparaisons au niveau national. Quand nous avons commencé les premiers essais pilotes en 2020, certaines entreprises exprimaient de légères réserves sur la méthode et les questions posées. À la fin de l’essai, toutes ont souhaité  poursuivre  l'expérience. Le principe directeur lors du développement de l’outil a été que celui-ci soit évolutif et accessible à tous, de façon à faciliter le recueil des données auprès de groupes significatifs de répondants. L’interface de l'application permet aux utilisateurs de choisir une langue à l’aide d’une vidéo, puis de répondre à des questions à choix multiples en sélectionnant les symboles donnés. Cet outil permet donc à ceux qui ne savent ni lire ni écrire de participer. Concrètement, les enquêteurs sur le terrain fournissent aux répondants un smartphone équipé de l’application, leur montrent comment procéder, puis leur fournissent un espace privé pour garantir l’anonymat des réponses. Ces dernières sont ensuite transférées sur un serveur lorsqu’une connexion Internet est accessible. La pandémie a pu avoir une influence sur la vie des gens de nombreuses façons : certains ont pu tomber  malades,d’autres ont vu leurs revenus chuter. L’éducation des enfants a pu être interrompue, si l’apprentissage à distance n’était pas disponible. En outre, les enfants ont pu avoir à aider leurs familles à joindre les deux bouts quand la situation économique était difficile. Les baisses des revenus ont pu empêcher le paiement des frais de scolarité. Autant de sujets qui sont couverts par l’enquête.

 

ÉVALUER LA CAPACITÉ DE RÉSILIENCE DES POPULATIONS AUX CHOCS

Les questions relatives à la santé évaluent l’opinion des répondants sur les performances des entreprises en matière de santé et de sécurité de leurs employés. D’autres questions déterminent si les répondants ont accès aux services de santé, et l’expérience qu’ils en font. Ces deux derniers éléments fournissent des informations précieuses pour évaluer les performances du système de santé et des entreprises dans des « conditions normales » et face à la pression exercée par la pandémie. De même, les questions sur la fréquentation scolaire des enfants et les raisons d’une éventuelle absence servent à refléter les changements entre les situations « normales » et pandémiques. Lorsque ces résultats sont combinés aux questions sur le revenu et la probabilité de pauvreté, ils donnent une bonne indication des corrélations, mais pas nécessairement des causalités. Les questions à choix multiples présentent des limites et ne peuvent pas produire de données qualitatives. Elles nous donnent malgré tout une indication des tendances. L’enquête demande par exemple aux répondants s’ils estiment que leur vie est meilleure qu’elle ne l’était il y a deux ans, révélant ainsi les effets de la pandémie sur leur existence. Une autre question sur leur capacité à rebondir après des temps difficiles indique leur accès à des filets de sécurité lorsqu’ils subissent des chocs, que ceux-ci soient causés par le changement climatique ou une pandémie. L'épidémie de Covid-19 a montré que de solides mécanismes d’adaptation sont essentiels pour renforcer la résilience. Nous pensons qu’il est nécessaire de mieux comprendre comment soutenir la « reconstruction en mieux » grâce au financement du secteur privé, pour garantir une meilleure résistance aux chocs à l’avenir. Les outils numériques peuvent nous y aider.

Anne Valto

Anne Valto

Conseillère principale en impact sur le développement
Finnfund

Parcours

Anne Valto est conseillère principale en impact sur le développement de Finnfund. Elle intervient depuis plus de 20 ans dans le secteur de la coopération et du développement. Dans ses fonctions actuelles, Anne Valto est spécialisée dans les secteurs forestier et agricole, l’adaptation au changement climatique, la biodiversité et les questions de genre. Elle travaille avant tout à établir des synergies entre les secteurs public et privé, la société civile et les communautés locales, tout en s’attachant à comprendre toutes les implications et les conséquences du financement du développement.

Finnfund

Finnfund est une institution de financement du développement finlandaise à retombées sociales. Elle cherche à construire un monde durable et à avoir un impact à long terme, en investissant dans des entreprises qui relèvent les défis du développement dans les pays du Sud. Chaque année, Finnfund investit 200 à 250 millions d’euros dans une vingtaine ou une trentaine de projets, mettant plus particulièrement l’accent sur les énergies renouvelables, la sylviculture et l’agriculture durables, et en soutenant les institutions financières ou les infrastructures numériques. Actuellement, ses engagements et ses investissements représentent un montant d’environ 1,22 milliard d’euros, dont la moitié en Afrique. Finnfund emploie une centaine de personnes, à Helsinki et à Nairobi.

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