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De l’eau potable pour tous : l’action d’Águas do Rio au Brésil

Publié le

Favela de Mangueira
© Pedro Ladeira

Secteur Privé & Développement #42 - Accès à l’eau et à l’assainissement : le secteur privé à la source

Cette revue est consacrée au rôle du secteur privé dans l’accès à l’eau et à l’assainissement. Un enjeu majeur alors que plus de 2,2 milliards de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à une eau potable de qualité à domicile, et qu’elles sont 3,5 milliards à ne pas disposer d’un assainissement adapté.

Dans le cadre de la privatisation des services d’eau et d’assainissement de l’État de Rio, la compagnie privée Águas do Rio – soutenue par IDB Invest et Proparco – a obtenu en 2021 la gestion de deux concessions où sont établies près de 10 millions de personnes. Leur accordement à un réseau d’eau fiable, géré avec des technologies de pointe, a bouleversé la vie des habitants, en particulier dans certaines favelas de Rio. Reportage.

Une ville dans la ville. Avec ses venelles et ses passages escarpés, le quartier populaire de Mangueira semble construit comme un immense labyrinthe coupé du reste de Rio de Janeiro. Juchée sur l’une des nombreuses collines (morros) qui caractérisent la topographie de la ville, à quelques pas du stade Maracanã, cette favela abrite pourtant plus de 30 000 personnes, soit l’une des densités les plus élevées du territoire carioca.

« Vivre ici a toujours été difficile. Ce sont les bidonvilles de Rio », témoigne Carlos Da Costa Silva (73 ans), natif de Mangueira. Les habitants du quartier – qui occupent pour la plupart des logements informels faits de briques et de tôles – « se débrouillent comme ils peuvent », appuie cet ancien vigile, fervent supporter du club de football local Vasco da Gama. « Il y a très peu de services et d’équipements collectifs et les opportunités de travail, à l’intérieur de la favela, sont rares. »

 

 

UNE EAU SAINE DANS LA FAVELA DE MANGUEIRA

Depuis trois ans, le quartier connaît toutefois une véritable transformation, aussi bien sanitaire que sociale. La quasi-totalité des habitations de Mangueira est en effet désormais raccordée au réseau d’eau officiel – géré par l’opérateur privé Águas do Rio (8 000 employés), filiale du groupe Aegea – ce qui permet l’accès à des services sûrs et de qualité. « C’est un changement majeur », témoigne le vieil homme. « Nous étions autrefois alimentés par un système rudimentaire de canalisations ». Les pertes étaient importantes et la qualité de l’eau très instable. « Nous réparions les fuites nous-mêmes, au milieu des eaux usées. Il fallait soulever de lourdes plaques en béton pour accéder au réseau souterrain. C’était très risqué ».

Des habitudes que les habitants de la rue Sinimbu, dans la partie ouest de la favela, n’ont pas abandonné. Là, les toutes dernières habitations du quartier (soit 400 maisons) attendent d’être raccordées au réseau. Elles le seront dans quelques mois. Pour le moment, une infinité de tuyaux branchés de façon anarchique et dont la plupart fuient en continu, courent le long des murs et de poteaux de soutien pour desservir chaque logement. De larges bassines, installées un peu partout, sont remplies à ras bord et servent de réserve lorsque les tuyaux sont à sec. « Les coupures d’eau, avec ce système, sont très fréquentes », précise Clayton Guilherme Da Silva, originaire de Mangueira et agent commercial pour le compte d’Águas do Rio. « Les installations sont hors d’âge. Mais bientôt, chaque famille ici aura son propre compteur ». Et conséquemment, un abonnement individuel ; un sésame qui permet aux habitants de ces quartiers populaires d’exercer leurs droits. Avec une preuve officielle de leur adresse, ils peuvent en effet disposer de services sociaux qui ne leur sont pas accessibles sans cela. Sitôt raccordés au réseau d’eau géré par Águas do Rio, ces résidents des favelas bénéficient par ailleurs d’un tarif dit « social », inférieur à celui pratiqué dans les quartiers plus aisés de la mégapole brésilienne.