Casablanca : avec ARMA, la révolution des déchets connectés

Dans le dédale des rues de Casablanca et de ses trois millions d’habitants, les camions d’ARMA mettent la dernière touche à leur ballet quotidien. Ces mastodontes de la propreté sillonnent quotidiennement les neuf arrondissements de la Ville Blanche, la plus peuplée du Maghreb, en couvrant près de 23 000 kilomètres par jour. Leur mission : collecter les 430 000 tonnes de déchets générés chaque année par les 1,5 million de personnes concernées par le périmètre d’intervention d’ARMA.
« Casablanca présente des paramètres qui lui sont très spécifiques », explique Yasmina Ahizoune, directrice générale adjointe d’ARMA. Avec une densité urbaine élevée et un trafic très important, « Casa » impose des exigences logistiques hors normes. À ces contraintes s'ajoute un objectif impérieux : optimiser l’efficacité de chaque tournée tout en réduisant les nuisances environnementales. Pour répondre à ces besoins, « nous nous appuyons désormais sur une forte digitalisation, révèle Yasmina Ahizoune. Nous avons équipé nos camions de dispositifs intelligents et de capteurs qui permettent de rationaliser notre activité et d'avoir une meilleure information sur notre empreinte carbone. Ces équipements offrent aussi une visibilité totale à notre client, la Ville de Casablanca, sur l'exécution de nos prestations. »
Pour répondre à ces défis, ARMA a scellé un partenariat dès 2019 avec Proparco, la filiale de l’Agence française de développement dédiée au secteur privé. Proparco intervient ainsi avec une garantie de 15 millions d'euros qui a permis de financer, via la banque marocaine BMCI Leasing, une grande partie des investissements du contrat de gestion des déchets signé avec la ville de Casablanca.
« Ces investissements étaient indispensables pour moderniser nos infrastructures, affirme Alaaeddine Bentbib, directeur administratif et financier du groupe ARMA. Ils s’inscrivent dans le cadre de notre contrat de délégation de service public avec la ville de Casablanca qui avoisine les 400 millions de dirhams [38,5 millions d’euros]. Il s’agit du plus gros contrat de gestion des déchets au Maroc, et un des plus gros en Afrique. » Car la gestion de la collecte des déchets de Casablanca est une démarche complexe et coûteuse nécessitant la mobilisation conjointe de la puissance publique et du secteur privé « avec une finalité commune », insiste Alaaeddine Bentbib : « L’amélioration du service public. »
Mais le partenariat entre les deux entités ne se limite pas à un soutien financier. Proparco accompagne ainsi ARMA dans une démarche d’amélioration continue, avec des audits réguliers portant sur des indicateurs environnementaux et sociaux. « Ces audits nous poussent à revoir constamment nos standards à la hausse, à un moment où les attentes des collectivités en matière de durabilité sont grandissantes, ajoute Yasmina Ahizoune. Nous avons été encouragés à adapter nos pratiques, à améliorer nos standards. » Autre atout qui a émergé avec l’appui de Proparco : « Notre partenariat commun a aussi la vertu de réconforter les banques », glisse la jeune dirigeante.
Pour relever le défi de sa mission d’intérêt public dans la ville de Casablanca, Arma a choisi les entreprises française Simpliciti et marocaine Velovolt pour la digitalisation de ses opérations, via un logiciel de suivi opérationnel innovant et l’installation de puces GPS/RFID sur ses véhicules, équipements et conteneurs.
Anciennement Sabatier Géolocalisation, Simpliciti est un concepteur français de technologies et de systèmes d’information conçus pour répondre aux enjeux des Smart Cities. Créé en 1994, Simpliciti compte aujourd’hui une centaine de collaborateurs et plus de 1600 clients, en Europe et en Afrique.
La gestion des déchets implique aussi des produits universels bien connus de toutes les communes du monde : les bacs et conteneurs. Arma a ainsi acquis la quasi-totalité de ses bacs auprès de Contenur, entreprise française et leader mondial de la conception, fabrication et commercialisation de solutions intégrales de conteneurs à déchets urbains. La société existe depuis plus de 30 ans et est présente dans plus de 40 pays à travers le monde.
À noter également, sur le plan européen : pour la fourniture de son matériel roulant, Arma entretien une relation privilégiée avec l’entreprise allemande Mercedes-Benz Trucks, qui fournit les châssis de ses poids lourds.
Dans ce contexte, l’innovation occupe un rôle prépondérant. Depuis 2019, ARMA a mis en place un système de gestion connecté de la collecte des déchets : « Il y a d’une part la partie "hard", développe Dakie Miri (photo ci-dessus), le directeur du centre de pilotage opérationnel d'ARMA. Ce sont les GPS installés dans tous nos camions sillonnant les rues de Casablanca. Certains GPS sont aussi utilisés sur les chariots des agents de balayage, qui assurent la prestation de balayage manuel. Et il y a d’autre part la partie "soft" : ce sont les données collectées par ces GPS. Ici, au centre de pilotage opérationnel, on stocke et on analyse ces données pour corriger certains circuits de collecte, afin de parvenir à une efficacité maximum dans la réalisation des prestations ».
Un dispositif innovant qui poursuit une double finalité : « Ce système nous permet d’analyser les données collectées en temps réel pour ajuster les circuits et réduire les trajets inutiles. L’objectif est une efficacité maximale, tout en minimisant l’empreinte carbone et les nuisances.»
Par ailleurs, les tournées autrefois majoritairement effectuées en journée sont aujourd’hui réalisées à 80 % de nuit. Cette stratégie, adoptée pour limiter les perturbations du trafic, a nécessité d’accompagner les citoyens vers un changement dans leurs habitudes – il leur faut désormais sortir leurs déchets à des horaires précis.
Le respect de l’environnement « est inscrit dans l’ADN du Groupe », souligne Yasmina Ahizoune. Ses investissements dans des véhicules équipés de technologies limitant les nuisances sonores et les émissions de CO² en sont une illustration.
« Aujourd’hui, nous ne pouvons pas dissocier la collecte des déchets d’une démarche respectueuse de l’environnement », insiste la directrice générale adjointe du groupe ARMA.
Au-delà des technologies, ARMA place l’humain au centre de ses initiatives. La formation continue de ses collaborateurs couvre des domaines variés, allant de la sécurité routière aux enjeux liés à la RSE.
L’entreprise se distingue également par son engagement en faveur de l’inclusion, avec déjà près de 6 % des employés du contrat de Casablanca en situation de handicap.
« En matière d'égalité de genre, nous faisons notre maximum pour pousser les effectifs féminins au sein des administrations et du management, dans des métiers historiquement très masculins », complète Yasmina Ahizoune.
Alors que le contrat d’ARMA avec la ville de Casablanca s’achève en 2026, l’entreprise regarde déjà vers l’avenir – et l’innovation, toujours. Les volumes de données collectées devraient ainsi être bientôt exploités par des algorithmes d’intelligence artificielle, permettant une optimisation encore plus fine des tournées. « Comme nous produisons énormément de data, il faut des algorithmes puissants pour, par exemple, recalculer le trajet optimal d’une tournée de manière automatique et très rapide », détaille Dakie Miri.
Une façon de poursuivre la tradition d’innovation d’ARMA, déjà bien établie : « Nous sommes les seuls à utiliser cet outil de traitement numérique de la gestion des déchets ici au Maroc et, à ma connaissance, les seuls en Afrique avec un système de gestion quasi en temps réel », avance le directeur du centre opérationnel. « Notre ambition est de faire de Casablanca un modèle en Afrique », renchérit Yasmina Ahizoune. Un objectif à même de transformer la gestion des déchets au Maroc au-delà des rues de Casablanca, tout en inspirant d’autres métropoles du continent.
Le partenariat noué entre ARMA, Proparco et la banque marocaine BMCI Leasing a notamment permis à ARMA de louer son matériel roulant au lieu d’en faire l’achat. Le dispositif est basé sur le même principe que le leasing proposé aux particuliers lorsqu’ils louent un véhicule en longue durée, avec option d’achat à la fin du contrat. Selon Alaaeddine Bentbib (photo ci-contre), directeur administratif et financier d’ARMA, le leasing présente trois avantages majeurs pour le Groupe :